A côté de la maladie d’Alzheimer (MA), d’autres maladies neurodégénératives, moins connues car identifiées plus récemment, méritent notre attention. Ces maladies dites « apparentées » ont en commun avec Alzheimer d’atteindre le cerveau et donc de se manifester par des déficits des fonctions cognitives. Un autre point commun est que toutes sont des « protéinopathies », c’est-à-dire qu’elles résultent de l’accumulation pathologique dans le cerveau de protéines modifiées qui entraînent la destruction des neurones, cellules essentielles pour le fonctionnement du cerveau. La distinction majeure avec la MA est que ces maladies sont le plus souvent associées à d’autres protéines que la protéine Tau et le peptide bêta-amyloïde, bien connus dans le cadre de la MA.

 

1.La maladie à Corps de Lewy (MCL)

La MCL est, par ordre de fréquence, la deuxième maladie neurodégénérative (250 000 cas en France). Elle est causée par l’accumulation anormale de protéine alpha-synucléine à l’intérieur des neurones, principalement dans les zones du cerveau liées aux fonctions cognitives et au mouvement. D’où l’association de symptômes, qui la font ressembler à la fois à Alzheimer et à Parkinson. De la maladie de Parkinson on retrouve les troubles moteurs : ralentissement, raideur des membres et tremblement. Quant aux troubles cognitifs, s’ils peuvent ressembler à ceux de la MA, ils tendent à traduire plus souvent une atteinte des parties antérieures (lobe frontal) et postérieures (lobe occipital) du cerveau : le trouble de l’attention, fluctuante, et ses conséquences cognitives marquent l’atteinte frontale, tandis que les difficultés pour l’orientation spatiale et la reconnaissance visuelle dénotent l’atteinte occipitale. Des hallucinations visuelles sont également assez fréquentes. La perte de l’odorat peut précéder de plusieurs années les autres symptômes de la maladie. Il est à noter que certains patients peuvent présenter des rêves angoissants accompagnés de mouvements amples et brutaux.

Il n’est pas rare que MCL et MA soient associées chez un même patient.

Les seuls traitements actuellement proposés sont ceux utilisés pour soigner la maladie de Parkinson pour les symptômes moteurs, et ceux utilisés pour la maladie d’Alzheimer pour les troubles cognitifs. Le développement de marqueurs biologiques de la pathologie de l’alpha-synucléine est en cours, étape indispensable à la réalisation d’essais thérapeutiques ciblés sur les bons patients.

 

  1. Les dégénérescences lobaires fronto-temporales(DLFT)

Plusieurs maladies sont regroupées sous le terme de DLFT. Elles ont en commun l’accumulation anormale de protéine tau ou de protéine TDP-43 dans le lobe frontal et la partie antérieure du lobe temporal du cerveau. Leur expression clinique est plus liée à la topographie précise des lésions qu’à leur nature.

Chef d’orchestre de notre cerveau, le lobe frontal reçoit et intègre les informations qui y parviennent, les redistribue aux zones cérébrales concernées, détermine la direction de l’attention et définit les réactions les plus adaptées aux situations en activant ou inhibant les comportements. C’est pourquoi la forme la plus fréquente de DLFT, dite comportementale, peut s’exprimer soit par une apathie et une absence d’empathie, soit par une désinhibition : perte du sens des convenances, familiarité, boulimie, irritabilité…

Si l’atteinte frontale est plus postérieure, elle peut entraîner des troubles du langage tels qu’une désorganisation et un ralentissement du discours, ainsi qu’une perte des règles grammaticales, connue sous le nom d’Aphasie Primaire Progressive Non Fluente.

Enfin une atteinte portant sur la partie antérieure du lobe temporal se traduira par la perte d’accès aux connaissances générales (notamment le sens des mots, des catégories) et à leur organisation réalisant un tableau de démence sémantique.

Les DFT sont les maladies neurodégénératives où le rôle de la génétique est le plus déterminant : 20-30% des cas de DLFT reposent sur des anomalies génétiques, qu’il est donc possible d’identifier permettant ainsi un diagnostic sûr.  Cela constitue aussi un espoir de traitement car cette connaissance précise offre des cibles sur lesquelles des essais de thérapie-génique sont en cours.

 

  1. L’encéphalopathie à prédominance limbique TDP-43 (LATE)*

Observés d’abord dans la Sclérose Latérale Amyotrophique et dans certaines démences fronto-temporale, des dépôts anormaux de protéine TDP-43 ont été également découverts dans les lobes temporaux de sujets âgés. En 2019, une nouvelle pathologie neurodégénérative a été identifiée et nommée LATE. Elle commence comme la maladie d’Alzheimer, par des troubles de la mémoire, concernant les faits récents, mais elle se manifeste plus tard, vers 80 ans, et évolue plus lentement, sans s’étendre aux autres fonctions cognitives. Sa découverte très récente et sa grande ressemblance avec la maladie d’Alzheimer (MA) expliquent de nombreuses erreurs de diagnostics, au point que des personnes atteintes par cette maladie ont probablement été intégrées à tort dans des essais cliniques de médicaments contre Alzheimer, avant l’utilisation des marqueurs fiables de la MA dont on dispose aujourd’hui.

Du vivant du patient, le diagnostic de LATE ne peut être que suspecté car on ne dispose pas, actuellement, de marqueur biologique spécifique de cette maladie, ni dans le liquide cérébro-spinal ni dans le sang.  Seule l’autopsie du cerveau permet de confirmer le diagnostic. Il est à noter que la présence de cette anomalie est fréquente après l’âge de 88 ans, bien que sa manifestation clinique ne soit pas systématique. Il est à noter qu’elle peut aussi coexister avec une maladie d’Alzheimer. La priorité, pour les chercheurs, est donc d’identifier les biomarqueurs qui permettront une certitude diagnostique, condition pour mener des essais thérapeutiques pertinents.

 

*LATE : Limbic predominant, Age-related, TDP-43 Encephalopathy

 

Pour en savoir plus sur les autres maladies dites « apparentées » à Alzheimer, rendez-vous ici