Communiquer quand les mots font défaut
Les premières difficultés d’expression chez un malade Alzheimer ont tôt fait d’inquiéter ses proches. Déjà la fin de votre communication avec lui ? Non, le début d’une communication nouvelle, qui exigera plus d’attention, mais permettra de conserver le contact jusqu’au bout. Voici quelques astuces.
Au cours de la maladie d’Alzheimer, la personne éprouve de plus en plus de mal à parler et à s’exprimer : elle ne trouve plus le mot juste, confond deux termes, peine à structurer correctement ses phrases, à rassembler ses idées… Et pourtant, ces difficultés de langage ne signent pas la fin de la communication avec son entourage, car la plupart du temps, même s’il n’arrive ni à parler ni à répondre, le malade sait très bien ce qu’il voudrait dire et comprend les paroles. Plus ce problème d’expression croît, plus il faudra veiller à lui parler beaucoup, pour éviter qu’il ne se sente marginalisé, et plus il deviendra crucial de réinventer la façon de s’adresser à lui. Les quelques pistes détaillées ci-dessous peuvent vous aider dans cette voie.
Capter l’attention
Avant de commencer à parler, attirez l’attention de votre proche pour qu’il se concentre sur vous et soit le plus réceptif possible : diminuez les bruits extérieurs qui peuvent brouiller votre message dans son cerveau ; touchez-lui légèrement la main ou le bras ; placez-vous devant lui, à sa hauteur, et regardez-le bien dans les yeux ; interpellez-le et présentez-vous à lui, dans une phrase du genre : « Bonjour papa chéri, c’est Jeanne, ta fille. »
Parler clairement
Inutile d’élever la voix : votre proche n’est pas sourd et il peut vous croire en colère si vous haussez le ton ! En revanche, mettez de votre côté toutes les chances d’être compris en rendant votre parole la plus limpide possible, c’est-à-dire : prenez une voix calme ; préférez les phrases courtes et simples ; conscient qu’il est plus long à assimiler, parlez-lui lentement, en articulant, et laissez-lui du temps pour réagir ou répondre.
Vérifier la compréhension
D’une part, assurez-vous que votre proche a bien reçu ce que vous lui avez dit, en cherchant des signes de compréhension ou de confusion dans son visage, ses expressions, ses gestes. En cas d’échec, répétez votre message. Si ce n’est toujours pas bon, n’insistez pas et attendez une autre occasion. D’autre part, vérifiez que vous-même avez bien compris ce qu’il voulait dire, en prenant l’habitude de reformuler ce que vous avez compris (quitte à rectifier au passage le mauvais usage d’un mot ou à compléter la phrase laissée en suspens) et de guetter son approbation.
Maintenir le dialogue
Parfois, les conversations avec un malade Alzheimer n’ont ni queue ni tête : ses réponses n’ont pas de rapport avec votre question, les propos sont déconcertants, embarrassants ou hors-sujet… Qu’importe ! Continuez comme si de rien n’était. Quand il « déraille » un peu, commentez de façon neutre : « Je vois », « Ah oui », puis revenez au sujet d’origine ou lancez en un autre. L’essentiel est de maintenir le flux de la conversation pour donner à votre proche l’impression de participer à un vrai dialogue. Il ne s’en sentira que mieux, car à défaut d’avoir eu un échange cohérent, vous lui aurez manifesté de l’intérêt.
Maîtriser ses émotions
S’il ne comprend pas forcément le sens des mots que vous utilisez, le malade ressent fortement les émotions avec lesquelles vous les prononcez. Soyez-y attentifs ! Si elles sont positives, laissez-leur libre court, mais dominez à tout prix celles qui le sont moins. Il est notamment courant que l’exaspération, l’agacement, le découragement vous gagnent quand la conversation est fastidieuse, malgré vos efforts. Dissimulez-les, car ils peuvent être pour votre proche une source d’anxiété, qui compliquera encore davantage la communication.
Utiliser le corps
Plus facile à assimiler, le langage corporel est une ressource précieuse pour appuyer ou remplacer le langage verbal. Ne vous en privez pas ! Les mimiques du visage, les gestes, le regard explicitent le sens de vos paroles et donnent à votre proche une double chance de vous comprendre. En lui disant de manger, faites-le geste de porter une fourchette à votre bouche ; donnez-lui confiance en lui en le prenant par la taille ; fixez-le avec bienveillance pendant qu’il le fait ; souriez-lui en le félicitant quand il a fini…
S’aider du visuel
L’écriture, le dessin, les photos et tout autre document iconographique peuvent aider à la compréhension, car la mémoire visuelle fonctionne parfois mieux que la mémoire auditive. Pour rappeler à votre proche où se trouve son repas, dites-le-lui, mais laissez-lui aussi un pense-bête bien en évidence sur une ardoise : « ton déjeuner est dans le frigo ». Quand vous lui parlez d’une personne, désignez une photo qui la représente pour qu’il fasse le lien etc.
Le toucher, dernier recours
Quand bien même vous avez l’impression qu’à la toute fin, votre proche est hermétique à ce qui se passe autour de lui, souvenez-vous que la mémoire affective est la dernière à disparaître. Continuez donc à lui exprimer votre amour par le toucher, la forme la plus primitive du contact humain : jusqu’au dernier moment, vos gestes de tendresse seront perçus.