Médicaments contre Alzheimer, où en est-on ?
Voilà maintenant des années que des traitements anti-Alzheimer suivent le long parcours du combattant des essais cliniques pour prouver leur efficacité contre la maladie. Plusieurs nouvelles encourageantes ont été annoncées ces derniers mois à ce sujet. À leur lumière, nous vous proposons un classement des médicaments, des plus au moins avancés.
- Le premier de la classe : le Lecanemab
Nous appelons sur le devant de la scène le Lecanemab, testé par les laboratoires japonais Eisai et américain Biogen, et nous l’applaudissons chaleureusement car, à la grande joie de la communauté scientifique, les résultats de son essai clinique de phase III sont clairement positifs : ils montrent une baisse de 27% du déclin cognitif chez les patients qui ont suivi ce traitement. C’est la première fois qu’un anticorps anti-amyloïde prouve ainsi son efficacité ! Cette bonne nouvelle, annoncée dès septembre par un communiqué de presse, a été détaillée le 30 novembre, lors de la publication complète de l’étude dans New England Journal of Medicine. L’essai confirmatoire avait été lancé en mars 2019, auprès de 1800 patients au stade précoce.
Attention, néanmoins, à ne pas se reposer sur ses lauriers, car la performance n’est pas parfaite pour autant : les effets indésirables, parfois graves, ne sont pas rares. 12,6% des patients traités avec le Lecanemab (vs 1,7% sous placebo) ont souffert d’un œdème cérébral et 17,3% (vs 9% sous placebo), d’hémorragies cérébrales. Même s’ils étaient attendus, car directement liés au mécanisme d’action du produit, ces dommages posent sérieusement la question de la tolérance…
Le 6 janvier il a été autorisé pour le marché américain par la FDA (Food and Drug Administration) sous le nom de Leqembi suite à une revue accélérée. Cette procédure implique que le laboratoire fournisse dans les années à venir des données de confirmation de l’efficacité et de la sécurité de ce produit à plus long terme. Le laboratoire Eisai a annoncé préparer la soumission des dossiers d’enregistrement en Europe et au Japon d’ici mars 2023.
- En progrès : le Masitinib et le Donanemab
Autre médicament anti-Alzheimer, le Masitinib aussi a connu des progrès encourageants cet automne : il va entrer en phase III ! Les principales agences de santé internationales viennent de donner leur feu vert, au vu des résultats prometteurs de la première étude de phase 2B/3, qui démontraient que le Masitinib administré à la dose de 4,5 mg/kg ralentissait le déclin cognitif et réduisait également la perte de capacité fonctionnelle dans les activités de la vie quotidienne. Espérons que ces constats positifs se confirment chez les 600 patients en cours de recrutement pour la nouvelle phase d’étude…
Le Masitinib se distingue des autres médicaments anti-Alzheimer évoqués dans cet article sur deux points importants : tout d’abord, il ne s’agit pas d’un anticorps anti-amyloïde : il ne cible pas les agrégats toxiques de bêta-amyloïde, mais la microglie et les mastocytes, afin de générer un effet neuroprotecteur qui modifie la maladie ; par ailleurs, alors que les anticorps ciblant l’amyloïde interviennent seulement lors de la phase précoce de la maladie, le Masitinib est administré plus tard, à un stade de démence légère ou modérée.
Le Donanemab, quant à lui, est déjà en phase III depuis août 2021, auprès de 1800 patients. D’après les essais précédents, cet anticorps anti-amyloïde, testé par le laboratoire EliLilly, permettait de constater une réduction des dépôts amyloïdes dans le cerveau des patients qui l’avaient reçu, ainsi qu’un ralentissement significatif du déclin cognitif. Ces bons résultats seront-ils confirmés par l’étude en cours ? Réponse au printemps 2023…
- Au point mort : Aducanumab
Après avoir suscité de grands espoirs, l’Aducanumab, testé par le laboratoire Biogen, est en pause. En juin 2021, cet anticorps anti-amyloïde était le premier médicament autorisé depuis 2003 aux États-Unis pour lutter contre la maladie d’Alzheimer. Mais en l’approuvant, la FDA était allée à l’encontre de l’avis d’un comité d’experts, remettant en cause la preuve de l’efficacité du médicament : si l’Aducanumab réduit bien les plaques amyloïdes dans le cerveau des patients traités par lui, les essais n’ont pas clairement montré qu’il limitait le déclin cognitif. Face à cette controverse scientifique, le FDA a préféré restreindre l’usage du médicament, qui sera même retiré du marché si un nouvel essai post-approbation n’a pas été réalisé d’ici 2030 pour en vérifier l’intérêt clinique.
- Recalés : Gantenerumab et Crenezumab
À la profonde déception de la communauté scientifique, les essais autour du Gantenerumab ont échoué en phase III. Cette mauvaise nouvelle, annoncée en novembre, tombe d’autant plus mal que la laboratoire suisse Roche, à l’origine de cet anticorps anti-amyloïde, s’était déjà cassé les dents en juin, avec le Crenezumab, qui n’avait pas non plus prouvé son efficacité contre la maladie d’Alzheimer.
En savoir plus sur la recherche de traitements : ici
Voir les résultats du Lecanemab publiés le 30 novembre dernier : ici