Les enfants se sentiront vite perdus s’ils voient un proche changer à cause de la maladie d’Alzheimer sans qu’on leur explique ce qui se passe. À partir de quatre contre-exemples, cherchons comment aborder cette pathologie complexe de la façon la plus adaptée à leur âge.
« Dis, c’est normal que grand-mère me demande toujours la même chose ? » ; « Pourquoi Papy ne se rappelle plus mon prénom ? » ; « C’est ma faute si grand-père s’énerve ? » Inévitablement, les questions se bousculent dans la tête des enfants quand ils sont confrontés aux changements de comportement d’un parent atteint par la maladie d’Alzheimer. Partons des quatre mauvaises réactions suivantes pour mieux comprendre comment faire face à leurs interrogations.
« Mais non, tout va bien ! Je ne vois pas de quoi tu parles… »
Sous prétexte de protéger l’enfant, vous avez peut-être envie de faire devant lui comme si de rien n’était, en fuyant ses questions et repoussant le moment d’y répondre. Rien de pire que de tels tabous ! Vous aurez beau lui assurer qu’il n’y a aucun problème, il sentira bien que vous êtes triste, que vous cessez parfois votre conversation quand il approche, que son grand-père a changé… Bref, qu’on lui cache la vérité ! En l’absence de vos explications, il risque d’interpréter la situation à sa façon, et je vous le donne en mille : ce ne sera pas la bonne ! Il en découlera des réactions néfastes pour lui-même et l’équilibre familial : désorientation, culpabilité, rancœur, sentiment d’exclusion, détachement… Dès que vous voyez qu’il se pose des questions, prenez le temps de lui en parler. Vous serez surpris de sa capacité à encaisser le choc et à comprendre un sujet grave.
« La maladie d’Alzheimer est une pathologie neuro-dégénérative qui affecte l’hippocampe… »
Stop ! Vous l’avez déjà perdu ! Certes, la maladie d’Alzheimer est un sujet complexe, mais l’enfant n’a pas besoin de tout savoir, ni de tout comprendre à son propos. Plus il est jeune, moins il a besoin de détails. Ce qu’il attend de vous, ce sont surtout des réponses à ses questions ciblées. Partez donc de ce qu’il vous a demandé ou de ce qui l’inquiète afin de le satisfaire. Pour être le plus accessible, rien de mieux que les phrases simples, les termes concrets et les cas de la vie de tous les jours. Par exemple : « Tu te souviens quand tu as vomi la semaine dernière. Tu étais malade dans ton ventre. Mamie aussi est malade, mais dans sa tête. Ça lui fait oublier des choses importantes et faire des choses bizarres. »
« Grand-père n’est plus lui-même, il perd la tête ! »
Facile de dramatiser en utilisant des mots trop forts, quand est soi-même très affecté par la situation nouvelle et qu’on a du mal à la digérer ! Cette tendance est à contrôler absolument dans le cas d’une conversation avec un enfant, qui prendra toutes vos paroles au premier degré et ne cessera de les retourner dans son jeune cerveau à l’imagination débordante. Pour éviter ce travers, commencez par choisir un moment où vous n’êtes pas vous-même sous le coup de l’émotion pour lui parler. La tête froide, vous parviendrez mieux à mesurer vos propos et à relativiser le problème. Des astuces : insistez sur les points positifs (« Cette maladie n’est pas contagieuse » ; « Ton grand-père n’a pas mal » etc.) ou choisissez d’en plaisanter gentiment : si l’enfant voit qu’on peut en rire, il se dira que ce n’est pas si grave et finira la discussion rassuré.
« Laisse-nous tranquille avec Mamie ! »
Dans votre discours et votre attitude, n’excluez pas l’enfant. Montrez-lui au contraire qu’il a lui aussi un rôle pour aider sa grand-mère malade, en lui suggérant de passer du temps avec lui et d’essayer de l’amuser. Non seulement il se sentira investi, mais il sera d’une aide réelle, car les plus petits révèlent une intuition inattendue dans ce genre de cas. Moins embarrassés qu’un adulte par les bizarreries du comportement, ils se montrent plus naturels avec lui. Guidés par leur imagination d’enfant, ils explorent avec davantage de créativité les modes de communication non verbale. Débordants de spontanéité, ils osent plus simplement les câlins, les caresses, peuvent se blottir, se percher sur les genoux… Autant d’éléments qui facilitent le maintien d’une étonnante complicité bienfaisante !
Dr Olivier de Ladoucette
Psychiatre et Gériatre
Président de la Fondation Recherche Alzheimer
Besoin d’aide ?
Si vous cherchez un support pour aborder le sujet avec votre enfant ou que ce dernier a besoin de le creuser davantage, n’hésitez pas à lui proposer :
Des livres : De nombreux ouvrages jeunesse mettent en scène des personnes souffrant d’Alzheimer afin de faire comprendre cette maladie en passant par des moyens adaptés aux petits : histoires, images, humour, poésie…
Des jeux : Adapt’ou Pas est un jeu de société conçu pour confronter de façon amusante les participants aux problèmes courants dues à la pathologie et leur apprendre à y réagir de la bonne manière.